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Les oeuvres 

L'étude des collections : genèse du projet.

Le projet Asie en région Centre-Val de Loire plonge ses racines dans l'étude des collections extrême-orientales des musées du réseau entre 2021 et 2023, menée par Estelle Brun (spécialité histoire des arts de l'Asie du Nord-Est) et Mathilde Rétif (spécialité histoire des arts du Japon). Ce long travail réaffirme les missions des musées sur les territoires : la recherche, la conservation et la transmission. 

Plongez dans les collections asiatiques
une oeuvre chaque semaine
 

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Okimono, représentant une maiko tenant une lanterne et accompagnée d’un chien
 
Gyokuzan (XIXe-XXe siècle), ivoire sculpté, Orléans, Musée d’Histoire et d’Archéologie, inv. 2000.2.141

Les okimono (objet ornemental) sont des éléments employés pour décorer des autels domestiques ou des alcôves. La taille et la matière de ces objets varient (bois, ivoire, navre, pierre) ; leurs formes puisent leur inspiration dans la nature, le quotidien ou mythes et légendes. A partir de la période Meiji (1868-1912) la production est majoritairement réalisée en ivoire et à destination du marché européen. Au cours de la période Edo (1603-1868), les mon sont utilisés par toutes les classes de la société pour identifier un clan, une famille. Les geisha, les maiko, les courtisanes ou les prostituées utilisent également des mon qui font référence aux maisons auxquelles elles appartiennent. Le Mitsudamae est l’un des symboles les plus anciens, mais il est également hautement décoratif et protecteur.

 

Plusieurs okimono de Gyokuzan sont conservés dans les collections de l'Hôtel Cabu - Musée d’Histoire et d'Archéologie d’Orléans, mais celui-ci se distingue par sa taille et le traitement de la silhouette, en S, caractéristique de la représentation des femmes dans le mouvement ukiyo-e.

 

La jeune femme est coiffée d’un chignon agrémenté d’un peigne et de deux kanzashi (épingles décoratives). Ce nombre indique le grade de la maiko, qui arrive ici au bout de son apprentissage. Elle porte un hikizuri, un kimono à ourlet et longues manches. Le motif couvre l’épaule et se prolonge sur tout le bas du vêtement.

Cette oeuvre sera présentée lors de l'exposition L'Ombre et la Grâce. Souvenirs du Monde Flottant, qui se tiendra du 20 septembre au 9 mars à l'Hôtel Cabu d'Orléans.

Ensemble de beautés, 1855, gravure sur bois, impression en couleur sur papier japonais
 
Kuniteru UTAGAWA (vers 1818-1860), Orléans, Hôtel Cabu - musée d’Histoire et d’Archéologie, inv. 2016.0.4174

Utagawa Kuniteru appartient à la dernière génération représentant l’ukiyo-e. Une partie de ces oeuvres est d’ailleurs sélectionnée pour être présentée à l’Exposition universelle de Paris, en 1867, première participation du Japon.

Il fait partie de l’école artistique Utagawa, prédominante pour les bijin-ga (peintures de beautés). Dans le coin inférieur, encadré en jaune, nous pouvons distinguer deux signatures “Kuniteru sha” et “Kunihiko ga”. Les deux ovales blancs autour portent la marque aratame (examiné/approuvé) et l’année d’édition (ici “année du lièvre, 12e mois”). L’artiste passe du nom Kuniteru à Kunihiko à partir de 1855 ; actif jusqu’au milieu des années 1860, la seule année correspondant à l’année du lièvre est 1855; ce jeu de déduction nous permet de connaître la date de l’oeuvre. Le caractère à l’encre noire désigne l’éditeur : Ôtaya Takichi.

Ces deux estampes ont été conçues pour fonctionner ensemble. Il est probable qu’une troisième venait compléter l’ensemble. Le cartouche rouge en haut, à droite, indique le titre de la suite : Bijin soroi/ 美人揃 (Ensemble de beautés). Les cinq personnages évoluent dans une intérieur traditionnel japonais. Sur l’estampe du haut, la séparation entre l’intérieur et la balustrade se fait à l’aide d’une cloison mobile appelée shôji (panneau de bois surmonté d’une partie en papier washi montée sur une trame de bois.

 

Sur l’estampe du bas portant un décors bleu et une bande représentant un canard mandarin, nous voyons un byobu (paravent), utilisés pour moduler les espaces dans les intérieurs traditionnels. Les deux estampes immortalisent une scène du quotidien dans le quartier de Yoshiwara. A droite, une courtisane termine de se préparer en ajustant un kanzashi (épingle à cheveux). Elle tient dans sa bouche un papier replié, renforçant l’impression d’un instant pris dans l’effervescence du moment. Elle est accompagnée d’une kamuro (apprentie) qui l’observe et a rapproché une lampe. Ce rôle social est très codifié et est endossé par certaines petites filles entre 5 et 12ans. Elle reçoit une éducation élitiste afin de devenir à son tour une courtisane de haut rang.

 

Sur l’estampe du haut, une courtisane (reconnaissable grâce à la ceinture que l’on devine noué devant) porte un plateau et deux récipients en porcelaines, contenant certainement des mets. Deux enfants jouent et grimacent autour d’elle.

Le quartier de Yoshiwara n’était pas seulement un lieu de prostitution. Il abritait des familles d’artisans et de commerçants. Les deux personnages dans l’estampe de gauche sont certainement des enfants d’une de ces familles et aident leur parents dans leur travail (ici, un restaurant).

Cette oeuvre sera présentée lors de l'exposition L'Ombre et la Grâce. Souvenirs du Monde Flottant, qui se tiendra du 20 septembre au 9 mars à l'Hôtel Cabu d'Orléans.

Vase au décor “mille-fleurs”
XIXe siècle, porcelaine, émaux opaques, émaux translucides et or sur couverteLithographie

 
Dynastie Qing (1644-1912), marque apocryphe du règne de Qianlong (règne de 1735 à 1796), Blois, Château royal, inv. 39.5.313
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Ce vase est réalisée en porcelaine et est recouvert d’une glaçure blanche opaque. Après une première cuisson dite “de grand feux” (1350°C), des émaux semi-opaques sont apposées. Les décors à l’émail est une technique minutieuse car chaque émail doit recevoir sa propre cuisson (dite “à feu de moufle”, entre 750°C et 800°C). La technique des émaux semi-opaques dits de « famille rose » est mise au point sous le règne de Yongzheng (1723-1735). Cette innovation est obtenue grâce à l’invention d’un émail blanc à base d’arsenic qui, mélangé aux émaux colorés, permet de réaliser des dégradés et des teintes pastel. L’émail rose est également mis au point à ce moment-là à partir de sels d’or, procédé technique importé d’Occident par les Jésuites entre le XVIIe et le XVIIIe siècle.

 

 

Il présente une forme fortement épaulée se terminant par un col relativement étroit et une panse légèrement aplatie. Sans doute était-il surmonté d’un couvercle à l’origine. Il est couvert d’un décor tapissant de fleurs d’essences très diverses (lys, pivoines, asters, chrysanthèmes, etc.) qui apparaissent en volume léger dans des tons pastels, donnant ainsi l’impression d’un brocart. L’intérieur et la base sont couverts d’émail turquoise et la lèvre est cerclée d’or. Sous la base se trouve un nianzhi (年制, marque de ) apocryphe du règne de l’empereur Qianlong (1735-1796) en sigillaire appliquée sur l’émail turquoise au rouge de fer sous couverte. La marque présente une légère variation par rapport aux nianzhi authentiques. Elle permet de donner de la valeur à la pièce et de revendiquer l’inspiration d’un modèle de porcelaine apparu à cette époque.

 

Le thème dit bai hua (百花, mille fleurs) correspond à une représentation de centaines de fleurs de toutes saisons : pivoines, hibiscus, roses, camélias, lotus, etc. Ce thème est un hommage à la Chine, qui se définit elle-même comme le Huaguo (花國, pays des fleurs). C’est également un décor auspicieux, chaque fleur ayant une signification bénéfique qui s’ajoute aux autres. Par exemple, la pivoine, considérée comme la reine des fleurs, évoque le printemps, la noblesse et l’opulence.

 

Ce décor apparaît sous le règne de l’empereur Qianlong et incarne le perfectionnement des techniques de la céramique au XVIIIe siècle en Chine. A l’origine, le décor « mille fleurs » est un véritable tour de force technique, associant à la fois des motifs réalisés au pinceau et des parties sur lesquelles l’émail est soufflé à travers un tube de bambou fermé d’une gaze fine, donnant ainsi à la couleur un aspect poudré et aérien. Pour cuire les différents types d’émaux, il a fallu plusieurs passages de la pièce en feu de moufle, à basse température. L’émail rose est obtenu à partir de chlorure d’or, le jaune d’antimoniate de fer, le vert d’oxyde de cuivre et le rouge-orangé à partir du fer. Chaque pigment minéral est ajouté à un mélange de plomb et de silice pour obtenir les émaux.

 

Ce vase semble être une imitation ou plutôt un hommage aux pièces prestigieuses du règne de Qianlong. Bien que le décor soit exécuté avec virtuosité, il est daté du XIXe siècle et s’inspire d’une production prestigieuse plus ancienne.

Série Cartes du Genji de Dame Murasaki
1857, gravure sur bois, impression en couleur, papier japonais
 
UTAGAWA Kunisada II (1823-1880), Chartres, musée des Beaux-Arts, inv. 2022.0.GR.10

La série des Cartes du Genji de Dame Murasaki est une suite de 54 estampes numérotées.

 

Chacune représente un chapitre de roman fleuve incontournable de la litterature japonaise. Cette oeuvre est rédigée entre 1005 et 1011 par MURASAKI Shikibu (v. 973-v. 1020), une dame de cour. À l’instar d’une grande partie des livres écrit à la cour de Heian (actuelle Kyōtō), ce dernier est rédigé en kana, l'écriture phonétique japonaise. En effet, la période Heian (794-1185) est marquée par une rupture diplomatique avec la Chine et une distanciation culturelle et artistique.

 

La période est marquée par l’émergence des kana ; si éemploi du sinogrammes reste fréquent, les kaba permettent l’émergence dnube littérature proprement japonaise dans le milieu aristocratique. Le Genji monogatari (Dit du Genji) est l’un des principaux exemples. Il relate l´histoire du prince Genji,un fils d’empereur qui ne peut prétendre au trône. La fresque poétique suit l’évolution de nombreux personnages sur trois générations, notamment aux amours du prince Genji.

Ce récit inspire de nombreux artistes, à toutes les époques.

Le Divan japonais
1892, Lithographie

 
Henri de Toulouse Lautrec (1864-1901), Le Divan japonais,1892, Lithographie, 80 x 62 cm
Issoudun, musée de l’Hospice Saint-Roch, inv. inv. 2011.1.17
© Issoudun, Musée de l’Hospice Saint-Roch

Cette affiche, réalisée pour Le Divan Japonais à Paris, célèbre une salle de spectacle réputée pour son décor inspiré du Japon : masques, paravents, lanternes, parasols et éventails y contribuent pleinement. Le lieu, fréquenté par une clientèle bohème et artistique, illustre l’effervescente de Paris à la fin du XIXe siècle. Commandée par Edouard Fournier (directeur de la salle) comme outil publicitaire, l’affiche dépasse largement ce rôle pour devenir une œuvre à part entière, symbole de la modernité de Toulouse-Lautrec.

 

La composition met en avant deux figures emblématiques de la scène montmartroise. La danseuse Jane Avril, assise au premier plan, est vêtue avec beaucoup d’élégance. Dans le quart supérieur gauche, la cantatrice Yvette Guilbert est reconnaissable à ses longs gants noirs, malgré le cadrage qui ne laisse pas de place à son visage.

 

Les tons bruns très estompés et les rehauts de jaunes qui se concentrent pour souligner certains points de la salle de spectacle, plongeant le spectateur dans l’ambiance animée et musicale de la vie parisienne.

 

Toulouse-Lautrec rompt avec les conventions de l’affiche publicitaire en proposant un cadrage audacieux. La perspective oblique rappelle certaines compositions des maîtres japonais. Les aplats de couleurs, l’absence de modelé, le cerne épais des contours témoignent de l’influence de l’estampe japonaise sur l’artiste, qui s’approprie ces codes pour proposer un graphisme résolument moderne.

Abumiguchi
Fin du XVIIIe siècle - 1ere moitié du XIXe siècle
Gravure sur bois, impression en couleur sur papier japonais
 
Hokusai Katsushika (1760-1849), Châteaudun, musée des Beaux-Arts et d’Histoire naturelle, inv. 2007.0.1.239

© Estelle Brun

Un nouveau genre littéraire prend son essor au même moment que l’ukiyo-e : il s’agit du kaidan, la littérature de fantômes et de créatures fantastiques. Parmi les premiers jalons de cette littérature figure l’Otogi bōko, rédigé par Asai Ryōi (1612-1691) en 1666, année où il publie également l’Ukiyo-monogatari.

 

Avec le développement de l’estampe, les histoires sont accompagnées d’illustrations. Ces ouvrages, appelés des e-hon, inspirent les artistes. Toriyama Sekien (1712-1788) consacre la fin de sa carrière à la compilation des figures surnaturelles, les yōkai, tirées du folklore. Il publie l’ensemble des créatures fantastiques recensées, plus de deux cents, issues de différents bestiaires. Il crée ainsi une véritable encyclopédie visuelle qui inspire encore les artistes de nos jours.

 

L’Abumiguchi est tiré d’un yōkai au registre plus élégiaque. À l’instar des esprits-renard, l’abumiguchi naît d’un objet ou d’un animal errant depuis 99 ans. L’objet en question ici est un abumi, un étrier, qui aurait été abandonné par un guerrier mort. Après avoir attendu un siècle que son maître vienne le chercher, en vain, l’objet se transforme en Abumiguchi et erre de façon mélancolique. Ce petit monstre se reconnaît par sa forme sphérique recouverte de poils et la bouche en forme d’étrier.

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Hone Onna
4e quart du XVIIIe siècle, encre et couleur sur papier japonais

Sangaku (dates inconnus), Loches, Musée Lansyer, OA.COLL.1893.123

La Hone Onna (littéralement “Femme squelette”) est un monstre tiré du folklore japonais. Il s’agit d’une belle courtisane qui, après la mort, revient sous un aspect cadavérique pour assouvir son désir.

Son histoire se fige avec l’essor de la culture urbaine et son goût pour les récits fantastiques. Elle illustre la tension profonde autour de la figure féminine portée par le syncrétisme entre le bouddhisme, le confucianisme et la culture populaire japonaise à cette époque. Revenante désirée à la beauté illusoire, elle aspire l’énergie vitale de ses victimes. Maudite, coincée entre vie et mort par excès de luxure, elle ne pourra jamais atteindre l’Eveil permis grâce au cycle des réincarnations.

 

Ce yôkai (monstre) apparait dans deuxième volume du bestiaire surnaturel Cent démons du présent et du passé illustrés, rédigé en 1779 par Toriyama Sekien. Ce dernier est une figure incontournable de l’art des yôkai. Il dédie près de dix ans à publier douze recueils dédiés à ces créatures surnaturelles et chaque texte est accompagné d’une illustration, ce qui apporte une base considérable dans le développement de la peinture de fantôme qui se développe au cours de la période Edo (1603-1868).

En effet, ces kaidan (récits surnaturels) sont largement plébiscités par les citadins. Une tradition voit le jour, le Hyakumonogatari kaidankai (Veillée des cent histoires de fantômes) : au cours d’une réception, 100 bougies étaient allumées. Chaque participant raconte une histoire fantastique et éteint une bougie.

Une restauration exceptionnelle

Cette oeuvre a bénéficié d’une restauration exceptionnelle pour pouvoir être présentée dans l’expositon L’Ombre et la Grâce. Souvenir du Monde flottant. Un bel exemple de collaboration et d’entre-aide des musées du réseau MCVL.

Les élèves de la spécialité Cinéma du Lycée Pothier ont filmé les différentes étapes de ce processus minutieux. Nous les remercions pour leur travail. 

A découvrir dans l'exposition L'Ombre et la Grâce mais aussi ci-dessous : 

Les coulisses de la restauration 
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ASSOCIATION OF SCIENTIFIC PERSONNEL
MUSEUMS IN THE CENTER REGION 

Created in 1977, it brings together the scientific staff of museums (curators, attachés, assistants) and represents a network of sixty museums in the Centre-Val de Loire region. The association benefits from the financial support of the Regional Department of Cultural Affairs of Centre-Val de Loire and the Regional Council of Centre-Val de Loire.

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